Haïti est un pays qui a une histoire tumultueuse et la vie de ses habitant.es est dure. Le tremblement de terre du 10 janvier 2010 et ses conséquences, en plus d’un bilan humain et matériel catastrophique, ont profondément déstabilisé le pays et notamment ses institutions et ses représentations politiques. Depuis juillet 2018, la situation politique du pays s’est encore dégradée et l’assassinat du président de la République, Jovenel Moïse, le 7 juillet 2021 démontre que le niveau de chaos, de violence et d’impunité est très élevé.

Qui gouverne en Haïti ?

L’assassinat du président Jovenel Moïse, survenu en plein imbroglio autour de sa décision de remplacer son premier ministre, a profondément choqué la population mais n’a pas déclenché d’intervention claire au niveau international. Alors que l’enquête sur cet événement semble stagner pour des raisons (géo-)politiques, l’ex-premier ministre Ariel Henry a depuis lors pris le rôle de chef de l’État. Cette gouvernance semble être partie pour durer malgré les revendications et dénonciations de plusieurs collectifs représentant la société civile qui démontrent l’engagement d’une partie des haïtien-ne-s des classes moyennes et élevées. Le gouvernement actuel est soutenu par les grandes puissances internationales (Etats-Unis, Union Européenne) ce qui lui confère une certaine sécurité et durabilité.

Explosion de la criminalité

En plus des effets néfastes qu’elle génère sur la démocratie et l’économie, cette situation politique n’assure plus au pays la sécurité et la justice pour ses habitant-e-s. La criminalité a explosé et les gangs mafieux sont maintenant au cœur de la société haïtienne et bénéficient d’une impunité totale. Plusieurs zones, dans et autour de Port-au-Prince, sont totalement contrôlées par les gangs, coupant complètement les voies de circulation. Au gré de la volonté des groupes armés, des régions du pays sont régulièrement coupées de la capitale provoquant d’énormes pénuries. Les kidnappings sont redevenus courants et touchent toute la population. Selon le CARDH (Centre d’Analyse et de Recherche en Droits de l’Homme), entre le 1er janvier et le 15 décembre 2021, 949 rapts ont été recensés (dont 55 ressortissants étrangers de cinq pays) contre 796 en 2020. Haïti est devenu le pays ayant le taux le plus élevé de kidnapping par habitant.

Inflation et pénuries

Sur le territoire où interviennent Habitat-Cité et l’organisation communautaire de base OJUCAH (Organisation des Jeunes Universitaires de Carrefour pour l’Avancement d’Haïti – principal partenaire d’Habitat-Cité en Haïti), dans les localités rurales des communes de la Vallée de Jacmel et Bainet, la situation est restée relativement stable. Les effets sur l’économie locale (pénurie et augmentation du coût des denrées et du carburant, baisse des capacités de vente vers Port-au-Prince) sont terribles pour les habitant-e-s mais la criminalité ne semble pas augmenter. Les habitant-e-s veillent à ce que les membres des groupes armés ne s’installent pas dans leurs territoires.

Un partenariat qui s’adapte

Les projets menés par OJUCAH et Habitat-Cité se basent majoritairement sur des ressources – humaines et matérielles – locales, ce qui a permis de poursuivre la quasi-totalité des activités. Des coûts ont augmenté, notamment le carburant et les matériaux importés tels que le ciment, et des déplacements à Port-au-Prince pour effectuer des achats ont été reportés. Les banques ont quant à elles eu plusieurs périodes de pénuries de liquidités, rendant aléatoire la disponibilité des fonds nécessaires à la réalisation des actions sur le terrain. Malgré le contexte, l’inventivité dont l’équipe d’OJUCAH a fait preuve, la flexibilité d’Habitat-Cité et le climat de confiance entre les deux organisations ont permis de réaliser la majorité des activités prévues dans le cadre des projets, comme la reforestation, la réhabilitation de 60 maisons et la formation de 20 artisans-e-s en construction.